21/04/2006 : News from CHEZ MOI
Le 21/04/06
Hello mes petits loups,
J’espère que vous allez tous aussi bien que votre reporter tout terrain. Je viens de réaliser que cela va bientôt faire un mois que j’ai pris mon poste et un mois et demi que je suis sur Batticaloa. Mon dieu, je ne sais pas pour vous, mais pour moi, le temps file vite, trop vite parfois. J’ai le sentiment à la fin de mes journées de ne pas avoir fait ce que je voulais (genre ce que j’avais prévu sur ma liste) mais en même temps, si je regarde bien, je ne chôme pas une minute. Heureusement que j’ai rencontré cette sri lankaise, masseuse, qui vient à domicile dénouer tous mes nœuds pour à peine 10$. C’est vraiment un petit plaisir que je me fais sans honte aucune. Mais il est temps n’est ce pas de vous raconter un peu ma petite vie professionnelle ici. Pour ceux qui en ont la curiosité et le temps, il y a un site internet « tamilnet » qui relate les informations du pays et plus précisément celles de notre zone (à forte proportion tamil et aussi, lieu d’affrontement entre l’armée et le LTTE, groupe de résistance tamil).
Alors voilà, en ce moment, nous traversons une période sensible. Il y a eu d’abord toute cette histoire sur les femmes tamiles travaillant pour les INGOs. De ce côté-là, nous avons une baisse des activités car certaines femmes de l’équipe n’ont pas voulu travailler pour un temps, histoire de voir le sérieux de la situation. On savait pour sûr que cela venait de groupuscules extrémistes, le LTTE nous disant qu’il n’y était pour rien dans cette histoire (de toutes façons, les notices ne comportaient aucun logo de leur part et ils ne sont pas du genre à agir anonymement). Et histoire de couronner le tout, nous étions que deux expatriés Tdh sur Batticaloa, entre ceux qui étaient en vacances et ceux qui étaient en déplacement pour le boulot (avec notre chef de mission en tête), donc il a fallu gérer comme on pouvait le truc et bien sûr avant de partir, notre chef de mission nous avait donné carte blanche quant aux décisions à prendre. Je suis donc allée cette semaine sur la base d’Ampara pour discuter sécurité avec l’équipe psychosociale puisque la responsable du programme est en vacances. Et là, grande nouvelle : un article dans la presse est paru de la part des officiels demandant aux femmes de ne pas arrêter de travailler mais d’être plus vigilantes sur les limites culturelles et leur comportement. Donc il semble que de ce côté, nous pouvons dire que nous avons un retour à la normale.
Mais cela serait trop simple. Malgré un cesser-le feu entre le gouvernement et le LTTE, les attaques ont repris depuis une quinzaine de jours. Ce fut d’abord dans le nord, à Tricomalae avec des attaques ciblées dans un premier temps puis contre les civils. D’ailleurs, une expatriée en vacances là-bas avec ses parents a été blessée au cours d’une explosion. Dieu merci, ils n’ont rien eu de grave mais on était un peu tous sous le choc. Depuis le début de la semaine, les attaques se multiplient mais aussi se rapprochent de Batticaloa et d’Ampara. Pour le moment, je vous rassure, je n’ai rien à craindre et nous prenons toutes les mesures nécessaires pour ne pas s’exposer inutilement. Donc de ce point là aussi, les activités pâtissent puisque les routes ferment après une attaque ou alors il y a des hartal. Quand je parle d’attaques, ce sont généralement des grenades sur des positions militaires ou LTTE et des bombes. Sauf que cette semaine, le LTTE a annoncé qu’il ne participerait pas aux pourparlers de paix avec le gouvernement, si ce dernier ne fait pas l’effort en premier de réduire les attaques. On devrait en savoir plus dès lundi mais cela veut dire que si aucune des deux parties ne veut céder, ils signeront un retour à la guerre civile.
Cela veut dire pour nous une révision complète de notre guideline de sécurité qui n’a pas été mis à jour depuis octobre dernier (donc la plupart des personnes en charge de faire les trucs sont parties et les autres pas formées). Alors je vais vous expliquer un peu ce que cela veut dire d’avoir un guideline de sécurité (alors pour ceux qui viennent du terrain, vous pouvez sauter ce paragraphe). Tout d’abord, nous avons différents niveaux de situations, avec des indicateurs de mesure :
Niveau un : situation normale, travail normal, bref tout va bien
Niveau deux : situation un peu tendue, travail partiellement perturbé (mise en place des premières règles de sécurité) et monitoring de la situation
Niveau trois : situation franchement tendue, renforcement des règles de sécurité, travail assez perturbé et possibilité d’hibernation (rester à la maison)
Niveau quatre : situation dangereuse et évacuation envisagée voire effective
Pour le moment, nous oscillons entre le niveau deux et trois et c’est pourquoi nous allons remettre à jour le guideline sécurité, surtout en cas d’évacuation partielle (sur Colombo) ou totale de la mission. Dès qu’une évacuation est décidée, en accord avec le siège, nous avons trois heures pour dégager. Cela sous-entend : faire nos sacs, prendre nos papiers, nos enveloppes sécu, prendre les dossiers sensibles avec nous, brûler les autres, se rendre au point de rendez vous et à ce moment-là démarrer le convoi. Ce type de cas de figure est rare (maman ne flippe pas) et souvent on reste au stade de l’hibernation (avec nos malles d’urgence nourriture). Bref, quoiqu’il en soit, les différentes tâches sont réparties entre les expatriés pour un gain de temps et éviter la duplicité. Donc revoir le guideline consiste juste à une mise à jour de qui ferait quoi en cas d’évacuation, une revue des routes à prendre, des messages à transmettre, etc.
Pour le moment, encore une fois, nous ne sommes pas encore tout à fait dans le niveau trois, donc on peut aussi très bien redescendre au niveau deux, rapidement. Mais en terme de vigilance, nous préférons prévenir plutôt que guérir.
Voilà pour le petit topo sécurité et au milieu de tout ça, nous faisons tourner les programmes ! Là comme ça, mes prochains grands chantiers sont : la parade du premier mai, le lancement de la réhabilitation de la consultation de jour pour enfants sur hôpital et la cotation pour la réhabilitation de l’école pour enfants déficients d’un des nos partenaires, sans parler de l’étude sur l’impact de nos programmes, le quotidien sur la protection et le psychosocial, etc.
Mais aujourd’hui, je vais vous parler de la parade du premier mai. Ici, comme en France, le 1er mai, c’est la fête du travail. Donc, avec un enthousiasme qui réchauffe le cœur, le staff a voulu monter (bénévolement) une parade dans les rues de la ville afin de promouvoir les droits de l’enfant et plus particulièrement pour sensibiliser l’opinion sur la problématique du travail des enfants. Comme nous avons le budget pour le faire, ils ont vu les choses en grand : une parade dans la ville avec 14 véhicules décorés (plus stéréo), 150 gamins de nos centres pour faire des danses, des scénettes de théâtre, plus les accompagnateurs. En tout, 250 personnes vont participer à cette manifestation publique. Nous allons distribuer des tracts sur les droits de l’enfant, demander aux chauffeurs de bus et de tuktuk s’ils veulent bien mettre des stickers sur leurs véhicules, chanter, danser, etc.
Nous avons complètement laissé l’équipe monter le programme et nous restons là comme conseillers uniquement, sauf pour le premier mai…
Non seulement je vais assister à la parade mais je serai la chef du véhicule premiers secours (je ne pouvais décemment pas me contenter de suivre la procession et de ne faire que des photos) donc, voilà, le week-end prochain, bien que cela soit trois jours off, je vais travailler, un au montage de la parade avec le staff et deux, en défilant pour les droits de l’enfant. Au fur et à mesure que la date approche, je sens une petite excitation monter en moi et je me fais violence pour ne pas mettre davantage mon nez dans cette affaire et laisser à l’équipe le soin de tout monter. Nous avons donc annoncé le programme aux autorités, aux médias (régionaux), aux autres INGOs parce qu’on est les seuls à faire quelque chose ce jour là et on veut vraiment qu’il y ait du monde dans les rues pour avoir un meilleur impact sur la population en terme de droits de l’enfant, donc le meilleur réseau de communication reste celui des INGOs.
Voilà en gros les dernières petites news terrain, je me force de ne pas vous en dire davantage pour toujours garder de quoi vous faire un récit fréquent.
Je vous embrasse très fort et prenez soin de vous.
Audrey
PS : aux visiteurs de mon blog, merci pour vos petits commentaires, même si je ne prends pas le temps de répondre, je trouve toujours celui de vous lire alors n’hésitez pas à continuer.
Hello mes petits loups,
J’espère que vous allez tous aussi bien que votre reporter tout terrain. Je viens de réaliser que cela va bientôt faire un mois que j’ai pris mon poste et un mois et demi que je suis sur Batticaloa. Mon dieu, je ne sais pas pour vous, mais pour moi, le temps file vite, trop vite parfois. J’ai le sentiment à la fin de mes journées de ne pas avoir fait ce que je voulais (genre ce que j’avais prévu sur ma liste) mais en même temps, si je regarde bien, je ne chôme pas une minute. Heureusement que j’ai rencontré cette sri lankaise, masseuse, qui vient à domicile dénouer tous mes nœuds pour à peine 10$. C’est vraiment un petit plaisir que je me fais sans honte aucune. Mais il est temps n’est ce pas de vous raconter un peu ma petite vie professionnelle ici. Pour ceux qui en ont la curiosité et le temps, il y a un site internet « tamilnet » qui relate les informations du pays et plus précisément celles de notre zone (à forte proportion tamil et aussi, lieu d’affrontement entre l’armée et le LTTE, groupe de résistance tamil).
Alors voilà, en ce moment, nous traversons une période sensible. Il y a eu d’abord toute cette histoire sur les femmes tamiles travaillant pour les INGOs. De ce côté-là, nous avons une baisse des activités car certaines femmes de l’équipe n’ont pas voulu travailler pour un temps, histoire de voir le sérieux de la situation. On savait pour sûr que cela venait de groupuscules extrémistes, le LTTE nous disant qu’il n’y était pour rien dans cette histoire (de toutes façons, les notices ne comportaient aucun logo de leur part et ils ne sont pas du genre à agir anonymement). Et histoire de couronner le tout, nous étions que deux expatriés Tdh sur Batticaloa, entre ceux qui étaient en vacances et ceux qui étaient en déplacement pour le boulot (avec notre chef de mission en tête), donc il a fallu gérer comme on pouvait le truc et bien sûr avant de partir, notre chef de mission nous avait donné carte blanche quant aux décisions à prendre. Je suis donc allée cette semaine sur la base d’Ampara pour discuter sécurité avec l’équipe psychosociale puisque la responsable du programme est en vacances. Et là, grande nouvelle : un article dans la presse est paru de la part des officiels demandant aux femmes de ne pas arrêter de travailler mais d’être plus vigilantes sur les limites culturelles et leur comportement. Donc il semble que de ce côté, nous pouvons dire que nous avons un retour à la normale.
Mais cela serait trop simple. Malgré un cesser-le feu entre le gouvernement et le LTTE, les attaques ont repris depuis une quinzaine de jours. Ce fut d’abord dans le nord, à Tricomalae avec des attaques ciblées dans un premier temps puis contre les civils. D’ailleurs, une expatriée en vacances là-bas avec ses parents a été blessée au cours d’une explosion. Dieu merci, ils n’ont rien eu de grave mais on était un peu tous sous le choc. Depuis le début de la semaine, les attaques se multiplient mais aussi se rapprochent de Batticaloa et d’Ampara. Pour le moment, je vous rassure, je n’ai rien à craindre et nous prenons toutes les mesures nécessaires pour ne pas s’exposer inutilement. Donc de ce point là aussi, les activités pâtissent puisque les routes ferment après une attaque ou alors il y a des hartal. Quand je parle d’attaques, ce sont généralement des grenades sur des positions militaires ou LTTE et des bombes. Sauf que cette semaine, le LTTE a annoncé qu’il ne participerait pas aux pourparlers de paix avec le gouvernement, si ce dernier ne fait pas l’effort en premier de réduire les attaques. On devrait en savoir plus dès lundi mais cela veut dire que si aucune des deux parties ne veut céder, ils signeront un retour à la guerre civile.
Cela veut dire pour nous une révision complète de notre guideline de sécurité qui n’a pas été mis à jour depuis octobre dernier (donc la plupart des personnes en charge de faire les trucs sont parties et les autres pas formées). Alors je vais vous expliquer un peu ce que cela veut dire d’avoir un guideline de sécurité (alors pour ceux qui viennent du terrain, vous pouvez sauter ce paragraphe). Tout d’abord, nous avons différents niveaux de situations, avec des indicateurs de mesure :
Niveau un : situation normale, travail normal, bref tout va bien
Niveau deux : situation un peu tendue, travail partiellement perturbé (mise en place des premières règles de sécurité) et monitoring de la situation
Niveau trois : situation franchement tendue, renforcement des règles de sécurité, travail assez perturbé et possibilité d’hibernation (rester à la maison)
Niveau quatre : situation dangereuse et évacuation envisagée voire effective
Pour le moment, nous oscillons entre le niveau deux et trois et c’est pourquoi nous allons remettre à jour le guideline sécurité, surtout en cas d’évacuation partielle (sur Colombo) ou totale de la mission. Dès qu’une évacuation est décidée, en accord avec le siège, nous avons trois heures pour dégager. Cela sous-entend : faire nos sacs, prendre nos papiers, nos enveloppes sécu, prendre les dossiers sensibles avec nous, brûler les autres, se rendre au point de rendez vous et à ce moment-là démarrer le convoi. Ce type de cas de figure est rare (maman ne flippe pas) et souvent on reste au stade de l’hibernation (avec nos malles d’urgence nourriture). Bref, quoiqu’il en soit, les différentes tâches sont réparties entre les expatriés pour un gain de temps et éviter la duplicité. Donc revoir le guideline consiste juste à une mise à jour de qui ferait quoi en cas d’évacuation, une revue des routes à prendre, des messages à transmettre, etc.
Pour le moment, encore une fois, nous ne sommes pas encore tout à fait dans le niveau trois, donc on peut aussi très bien redescendre au niveau deux, rapidement. Mais en terme de vigilance, nous préférons prévenir plutôt que guérir.
Voilà pour le petit topo sécurité et au milieu de tout ça, nous faisons tourner les programmes ! Là comme ça, mes prochains grands chantiers sont : la parade du premier mai, le lancement de la réhabilitation de la consultation de jour pour enfants sur hôpital et la cotation pour la réhabilitation de l’école pour enfants déficients d’un des nos partenaires, sans parler de l’étude sur l’impact de nos programmes, le quotidien sur la protection et le psychosocial, etc.
Mais aujourd’hui, je vais vous parler de la parade du premier mai. Ici, comme en France, le 1er mai, c’est la fête du travail. Donc, avec un enthousiasme qui réchauffe le cœur, le staff a voulu monter (bénévolement) une parade dans les rues de la ville afin de promouvoir les droits de l’enfant et plus particulièrement pour sensibiliser l’opinion sur la problématique du travail des enfants. Comme nous avons le budget pour le faire, ils ont vu les choses en grand : une parade dans la ville avec 14 véhicules décorés (plus stéréo), 150 gamins de nos centres pour faire des danses, des scénettes de théâtre, plus les accompagnateurs. En tout, 250 personnes vont participer à cette manifestation publique. Nous allons distribuer des tracts sur les droits de l’enfant, demander aux chauffeurs de bus et de tuktuk s’ils veulent bien mettre des stickers sur leurs véhicules, chanter, danser, etc.
Nous avons complètement laissé l’équipe monter le programme et nous restons là comme conseillers uniquement, sauf pour le premier mai…
Non seulement je vais assister à la parade mais je serai la chef du véhicule premiers secours (je ne pouvais décemment pas me contenter de suivre la procession et de ne faire que des photos) donc, voilà, le week-end prochain, bien que cela soit trois jours off, je vais travailler, un au montage de la parade avec le staff et deux, en défilant pour les droits de l’enfant. Au fur et à mesure que la date approche, je sens une petite excitation monter en moi et je me fais violence pour ne pas mettre davantage mon nez dans cette affaire et laisser à l’équipe le soin de tout monter. Nous avons donc annoncé le programme aux autorités, aux médias (régionaux), aux autres INGOs parce qu’on est les seuls à faire quelque chose ce jour là et on veut vraiment qu’il y ait du monde dans les rues pour avoir un meilleur impact sur la population en terme de droits de l’enfant, donc le meilleur réseau de communication reste celui des INGOs.
Voilà en gros les dernières petites news terrain, je me force de ne pas vous en dire davantage pour toujours garder de quoi vous faire un récit fréquent.
Je vous embrasse très fort et prenez soin de vous.
Audrey
PS : aux visiteurs de mon blog, merci pour vos petits commentaires, même si je ne prends pas le temps de répondre, je trouve toujours celui de vous lire alors n’hésitez pas à continuer.
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